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Per la lenga d'òc

31 Janvier 2014 , Rédigé par Mirelha

A l'occasion du vote par l'Assemblée nationale du texte concernant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, nous vous offrons cette page de Claude Martí, toujours d'actualité :

PER LA LENGA D’OC

Tenons ferme. Après l’Édit de Villers-Cotterêts (1539) lui interdisant

toute expression officielle, la langue d’oc s’était réfugiée à fleur de sol

pour continuer à dire l’eau, la terre, le vent, le travail et les émotions des

hommes. Aiga, tèrra, vent, trabalh, espèr e dolor... Clandestins dans leur

propre pays, les mots de la vieille langue avaient tenu bon, cachés au

mitan de nos souvenirs, embusqués dans le maquis de nos cordes

vocales. Les gens de grand pouvoir les pourchassaient, les imbéciles

(d’ici et d’ailleurs) affligés du moindre atome d’autorité rêvaient de leur

couper pour une bonne fois le souffle. Mais la parole d’oc continuait

d’exister d’une vie ténue mais tenace dans l’intimité des familles, portée

quelquefois au grand jour par les fous et les poètes. Tenons ferme.

Savoir tordre le temps et l’espace qui nous étaient chichement impartis

pour nous les rendre habitables, nous y lover et y faire du sang neuf,

prêts à bondir à la lumière : voilà notre force. Vaille que vaille, coûte que

coûte, notre langue a traversé le temps des rois et des empereurs. Voilà

deux siècles que nous sommes en République. La République est un

corps vivant, elle est constituée d’une collectivité de citoyens fédérés

autour des trois grands principes fondateurs : Liberté, Égalité, Fraternité.

C’est au nom de la liberté, de l’égalité et de la fraternité que nous

demandons aujourd’hui un service minimum de dignité reconnue pour la

langue d’oc et les autres langues de la République. La dignité, pour une

langue, c’est la possibilité pleine et entière d’être enseignée et apprise, la

possibilité de manifester sa présence active — par tous les moyens

opportuns — dans tous les lieux et dans toutes les circonstances de la vie

des hommes.

Il n’existe pas de peuple inférieur, il n’existe pas de langue mineure :

cette certitude, nous la tenons de la République elle-même ! Nous la

tenons de ces passeurs de futur que furent Jean Jaurès et Ernest

Ferroul, nous la tenons de nos poètes ouvriers, de nos éducateurs, tels

Victor Gelu, Auguste Fourès, Antonin Perbosc, Frédéric Mistral, René

Nelli, Joseph Delteil. Une langue n’est pas un simple catalogue de mots,

elle est une manière d’être à l’univers, une part irremplaçable de la

culture de l’humanité. Défendre la langue d’oc aujourd’hui, ce n’est donc

pas simplement vouloir sauvegarder un patrimoine essentiel, un héritage

légitime : c’est œuvrer comme citoyen responsable dans la République,

et au delà, s’affirmer comme citoyen du monde.

Tenons ferme. Il va falloir encore et encore tailler la piste dans la jungle

épaisse de l’ignorance, des conformismes, des peurs anachroniques et

des calculs de rentabilité à court terme. Mas lo jòc n’en val la candèla, e

entre totes, me damne : i arribarem !

Claude MARTI.

Per la lenga d'òc
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M
Bien entendu, la photo de Claudi Martí qui illustre ce texte a été prise à Ventenac-Cabardès par Sabine Barbié. Merci à elle !
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